Le témoignage de Viviane
16 novembre 2017
Je suis arrivée en Suisse début juin. J’ai expliqué au
centre fédéral de Vallorbe les raisons pour lesquelles je ne peux pas retourner
en Italie avec mes enfants. Là-bas, où nous avons vécu une année et quelques
mois, nous avons été changés de logement 6 ou 7 fois. Une fois, nous vivions
dans une maison dans la forêt, loin de tout. Quand mon fils a eu une crise le
soir, les secours ne sont venus que le lendemain matin à 9h00. Nous n’avions
pas de stabilité et la scolarité des enfants a été très difficile. Les plus
grands n’avaient pas accès à une formation et ne savaient pas quoi faire. Je suis malade, mais ils m’ont dit qu’ils
n’ont pas la possibilité de m’aider. J’ai des fibromes. Moi-même je ne sais pas
ce que c’est. C’est dans le bas-ventre, ça me fait mal, j’ai des vertiges, des
vomissements et des saignements. Certains jours, je dois rester alitée, je ne
peux pas me lever. En Italie, ils m’ont juste donné du paracétamol, un
médicament pour que je ne saigne pas trop et des calmants. La dernière fois que
je suis allée, le docteur a demandé à la dame pourquoi elle ne m’emmenait pas
directement aux urgences parce que c’était aigu. Elle a dit que comme c’était
une décision positive, c’était à moi de me débrouiller et que je ne faisais
plus partie du projet d’aide sociale. Après, ils nous ont dit de quitter la
maison parce que nous n’avions plus droit à l’aide. Nous n’avions plus rien ni
nulle part où dormir. C’est alors que nous sommes venus en Suisse pour demander
l’asile. J’ai quitté mon pays en 1996 à cause de la guerre qui sévit toujours.
Je suis en déplacement avec mes enfants depuis des années, en Tunisie, en Libye…
Mes enfants ne sont pas nés dans leur pays. Mon mari nous a abandonnés.
Au centre fédéral, début juillet j’ai souffert de vertiges
et de palpitations. J’ai été conduite chez le médecin qui m’a dit que je porte
deux fibromes et que je dois être adressée à un médecin spécialiste. J’avais un
rendez-vous le 17 pour discuter de la suite, mais ce rendez-vous a été annulé à
cause de mon transfert au centre fédéral des Perreux et mon suivi médical a
ainsi été interrompu. Je souffre de saignements et on m’a expliqué que je
n’avais accès qu’aux soins en cas d’urgence. J’ai toujours des palpitations. Pendant
mon séjour au centre fédéral, je ne connaissais pas le diagnostic exact de ma
maladie ni les traitements médicaux à suivre. Finalement, j’avais un
rendez-vous pour être opérée mi-octobre, mais cela a été annulé de nouveau à
cause de mon transfert dans un autre centre.
C’est après mon arrivée dans le canton que le diagnostic a
été posé. Je dois être opérée bientôt, en décembre. Dans l’intervalle, le SEM a
rendu une décision de renvoi en Italie pour toute la famille. Il est seulement
écrit dans la décision « qu’aucun rapport médical n’a été versé dans le
délai imparti », parce que le rapport a été envoyé avec un peu de retard.
Le SEM dit encore qu’il n’existe pas d’obligation de l’Italie de fournir une
aide sociale aux familles ! Comme si ce n’était pas important que je me
retrouve à la rue avec mes trois enfants mineurs. Le SEM dit aussi que rien
n’indique que nous aurions accompli des démarches auprès des autorités
italiennes pour obtenir un logement. Ils n’ont pas écouté ce que j’ai expliqué,
que ce sont les autorités italiennes elles-mêmes qui nous ont subitement
demandé de quitter le logement et de nous débrouiller par nous-mêmes. Je ne
peux pas retourner en Italie. Il est impossible pour moi de vivre dans la rue,
seule avec mes enfants.
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