Jeudi matin 4 novembre, notre ami Jawid a été arrêté par la police vaudoise. Originaire d’Afghanistan, il a fui son pays de naissance en quête de protection en Europe. Il a d’abord atterri en Suède, avant d’atteindre il y a une année la Suisse, pour y rejoindre sa sœur qui y vit. Mais voilà, qui dit Suède dit accords Dublin, et les autorités ont décidé que c’est dans ce pays qu’il doit rester, alors même que la Suède n’accorde que très difficilement l’asile aux personnes afghanes.
Nous ne savons à l’heure actuelle pas où est Jawid, s’il est
déjà dans un avion pour la Suède ou encore emprisonné en Suisse.
Ce que nous savons en revanche, c’est que les autorités
vaudoises, en particulier Philippe Leuba, en charge de l’asile, ne reculent
devant aucune hypocrisie dans la question des refugié·es afghan·es. Le 20
octobre 2021, Philippe Leuba se gargarisait dans la presse de son geste
humanitaire en faveur de vingt cyclistes afghanes, exfiltrées et arrivées en
Suisse pour obtenir l’asile. La préparation de l’arrestation de Jawid se
faisait en parallèle.
Comble de l’ironie, les député·es du Grand Conseil ont voté
le 12 octobre 2021 une résolution (21_RES_14) demandant
au Conseil d’Etat de soutenir les personnes réfugiées afghanes. Pour notre
part, mardi 2 novembre, nous avons déposé une pétition munie de 823 signatures
demandant aux autorités vaudoises de tout faire pour faciliter l’accueil des
réfugié·es afghan·es, y compris de suspendre tous les renvois prévus. Mais
apparemment le Conseil d’Etat et l’administration vaudoise restent de marbre.
Nous sommes inquiètes pour Jawid, fragilisé par des années
de procédures et de pression (comme il l’explique dans son témoignage en pièce
jointe) et demandons la suspension immédiate de son renvoi, ou son retour en
Suisse. Les autorités helvétiques doivent lui accorder la protection à laquelle
il a droit et arrêter de persécuter les réfugié·es afghan·es dont le sort émeut
tout le monde sans pour autant donner lieu à un accueil digne de ce nom.
Témoignage de Jawid Y. :
Jawid est débouté, Non entrée en matière
Dublin, à l’aide d’urgence depuis le 10 juin 2021. En Suisse depuis le 1er
octobre 2020, il est menacé de renvoi Dublin en Suède, d’où il est menacé de
renvoi en Afghanistan car il a été débouté en Suède où il avait demandé l’asile
à son arrive en Europe. Quand il a quitté l’Afghanistan mi-2015, il avait 21
ans. Aujourd’hui il a 27 ans .
I want to live like a normal person, I want to
have the same rights, I want to study, I want to work.
I want to speak to my family (in Tadjikistan
now) and not lie to them.
Since 6 years I’m lying to them because I don’t
want to tell them what I’m going through.
It would destroy them. My mom would be
destroyed if she knew what I’m going through.
I say that I’m fine, that I’m waiting for my asylum answer, that I’m ok, that I have French courses…
My dream is to have a normal life. I don’t
demand anything else, just to have a normal life. I don’t want to live in a
refugee camp anymore.
I just want to do things that I want.
I don’t want every night security guards knock
on my door and check if I’m here.
I don’t want to be forced to go to SPOP and EVAM offices every day, or every two days…and to wait there for the white paper and to get 9.- CHF per day to survive here.
My dream in Afghanistan was to get a diploma in
IT ingeniring. I was studying IT in Kaboul Technic University and I liked it. I
studied 2 and ½ years at this University.
But I was forced to live my country very
quickly.
I even could not say good-bye to my family before leaving Kaboul because they live in the countryside.
During all this years in Sweden, I was
studying.
I studied hard Swedish language. I passed the
Swedish test in 1 and 1/2 year. Usually people need 4 to 5 years to succeed
with this Swedish test.
I went to school in Sweden.
I was just ready to start University there.
I had every possibility to enter to University…expect the permit.
Now I don’t have the energy anymore to study.
I want to stop.
I question myself. Is this life really fair to
stress myself…and to try to survive here…
I don’t have hope anymore.
I even committed suicide while in Bex.
I see the doctor once a week and I see the psychologist from the hospital every day in Bex. It’s boring to see them, to talk to them, knowing that nothing will change.
And the doctor, what they can do? When they ask
me how I am feeling, I answer: « Well, I’m pissed of like all the other
days ».
I asked them not to come on Friday. But they
say “No”, because their boss took the decision that the doctor have to see me
every day.
I don’t see any light. For me, my life is like walking in a dark
room and I don’t know when I’ll crash the wall.
(AF, récit récolté le 4.10.21, Lausanne, pour DDR)
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