La crise de la COVID-19 a
profondément marqué la société, et a révélé des fractures importantes entre
personnes privilégiées et celles précarisées. Les personnes sans statut légal
se sont retrouvées subitement sans emploi et sans protection sociale. On n’a
moins parlé des requérant·e·s d’asile, en procédure ou débouté·e·s, qui vivent
dans des centre d’hébergement collectif.
Dans certains cantons, les
autorités se sont assises sur leur devoir d’assistance, à tel point qu’une plainte
pénale a même été adressées contre les responsables des centres de Zurich. Dans
le canton de Vaud, la prise en charge sanitaire a été correcte, il n’y a pas eu
de réelle explosion de cas dans un foyer, celles et ceux qui en avait besoin
ont été soignés. Mais les mesures sans doute nécessaires pour lutter contre le
virus ont eu des conséquences néfastes pour la vie dans les foyers, déjà
difficiles sans la COVID-19.
Pour les résident·e·s des foyers,
le confinement a amplifié les problèmes déjà existants : promiscuité, manque
d’intimité, contrôle social exercé par le personnel de l’EVAM, notamment les
agents de sécurité en uniforme. Le vrai problème ce n’est pas l’épidémie, mais
l’existence même de foyers pour migrant·e·s.
En Suisse, les hébergement collectifs
sont généralement prévus pour répondre aux besoins spécifiques d’une population
: EMS pour les personnes âgées ou souffrant de grave troubles psychiques,
foyers pour mineur-e-s en danger... Deux exceptions : la prison - pour des
raisons pénales et les centres d’accueil pour migrant·e·s.
Dans le canton de Vaud, le cadre
légal prévoit un hébergement collectif pour les personnes à l’ « aide
d’urgence ». La visée est alors purement répressive. En fermant aux
personnes déboutées de l’asile l’accès aux logements individuels (appartement),
les autorités souhaitent les dissuader de s’installer en Suisse.
Pour celles et ceux qui sont au bénéfice d’un
permis N (demande d’asile en cours) ou F (admission provisoire), le guide
d’assistance de l’EVAM prévoit entre autres des critères tels que
« l’existence d’un revenu stable », le « comportement,
collaboration et intégration » et « l’aptitude à vivre en logement
individuel ». Le préjugé sous-entendu est flagrant. Certain·e·s requérant·e·s d’asile sont perçu·e·s comme
intrinsèquement ou culturellement inaptes à la vie normale dans notre société.
La réalité démontre l’absurdité de cette position : Les personnes qui
obtiennent le statut de réfugiés (permis B) sont prises en charge par le CSIR
qui ne dispose d’aucun logement collectif. Sauf exceptions liées à leur état de
santé, elles sont donc toutes logées en appartement indépendamment de la
perception qu’on les autorités de leur « intégration » ou de
leur « comportement ».Des milliers de bénéficiaires du Revenu d’Insertion
(RI) vivent normalement en appartement sans bénéficier d’un revenu stable...
Les personnes logées en foyer sont
soumises à un contrôle social accru. Des agents de sécurité en uniforme
contrôlent les entrée et les sorties et peuvent effectuer des contrôle en
chambre jour et nuit. Surtout ils rédigent d’innombrables rapports
« d’incivilités » dès qu’une personne hébergée s’écarte un tant
soit peu d’une position de parfaite soumission. Ces rapports peuvent ensuite
être utilisés pour justifier ad aeternam le
maintien en foyer.
Les conflits sont bien entendu
inévitables entres les personnes entassées dans les hébergements collectifs.
Celles et ceux qui souffrent de troubles psychiatriques peuvent facilement
décompenser et adoptent parfois un comportement violent. Mais ces
problématiques sont prises en charge, plus ou moins heureusement, par le
personnel de l’EVAM. Les personnes qui habitent dans les foyers ne sont pas
consultées, elles ne peuvent que subir sans avoir le droit d’agir.
L’hébergement en foyer constitue
donc la parfaite illustration de la discrimination envers les requérants
d’asile : jugé·e·s culturellement inadapté·e·s, trop agité·e·s, trop sal·e·s
pour vivre normalement en appartement. Le foyer pour migrants est également le
lieu où cette discrimination trouve sa justification : les résidents sont sous
observation quasi-permanente du personnel de l’EVAM. Dans de telles conditions
tout comportement peut être relevé et interprété comme une contre-indication à
la vie en appartement.
Il s’agit d’une politique assumée
par l’Etat : L’EVAM a des appartements à disposition mais résilie de manière
anticipée ses baux immobiliers...
Nous exigeons la fermeture de tous les foyers EVAM destinés spécifiquement aux migrant-es et leur relogement dans des
appartement décents !
Quand j’avais un papier blanc (l’aide d’urgence), l’EVAM me disait : « il faut avoir un permis F ou B pour avoir un appartement ». Quand j’ai eu un permis F, ils m’ont dit « il faut avoir un travail pour avoir un appartement ». Mais c’est impossible de trouver du travail en vivant dans un foyer, il y a toujours du bruit, toujours des problèmes, on ne peut pas se reposer. L’EVAM veut nous garder dans les foyers pour nous contrôler et qu’on ne puisse pas s’intégrer. Ça fait huit ans que je suis en Suisse, toujours dans des foyers. Je voudrais une vie normale.I.F. 31 ans
Je vis avec mon fils de 4 ans dans une pièce de 12m2. Pendant le confinement, nous nous étions organisé avec une autre famille pour nous occuper à tour de rôle de nos enfants. Parfois la journée, ils jouaient sous la surveillance d’un adulte dans le couloir entre les chambres. On ne pouvait pas aller dans les parcs et les enfants ont besoin de se dépenser. Un Securitas nous a dit que nos enfants n’étaient pas sages, que j’étais une mauvaise mère et que le SPJ allait me prendre mon fils !K. S. 38 ans
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire