lundi 21 février 2022

Signez la lettre ouverte des cellules de rétention sous les rails

 La lettre ouverte qui a circulé la semaine passée pour dénoncer le projet de créer un immense centre des forces de l'ordre dans la future gare de Lausanne a rencontré un soutien considérable! Il y a donc désormais une pétition lancée par la coordination contre les renvois, dont on fait partie, et vous pouvez la signer en ligne ici. 


jeudi 17 février 2022

Lettre ouverte: Des cellules de rétention sous les rails

Nous relayons ici une lettre ouverte, qui circule depuis lundi à l'initiative de la coordination contre les renvois. 49 personnalités des milieux culturels, politiques et associatifs l'ont signée pour exiger l'arrêt de ce projet qui va à l'encontre de la fonction première d'une gare, lieu d'échanges et d'ouverture sur le monde.

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(les signatures individuelles ne sont plus mises à jour depuis le 17 février. Pour signer, c'est ici)

Des cellules de rétention sous les rails

 
Une gare, c'est quoi ?
 
C'est un possible infini de rencontre, un lieu qui n'appartient à personne, un lieu l'on arrive, un lieu tout peut commencer. Combien de fois dans l’Histoire, les gares ont-elles été des portes ouvertes pour des populations en errance fuyant la guerre ou chassées de chez elle par des jeux géopolitiques qui leur ordonnaient de quitter leur maison ? Combien de vies ont recommencé dans un hall de gare ? Combien de vies se sont croisées dans ces espaces de pur mouvement ? Le monde se croise là et c'est une chose précieuse.
 
Aujourd'hui Lausanne est en travaux, des grues de toutes parts, on invente un  nouveau  visage,  on  s'enivre d'ambitions, de pôle muséal, de nouvelles places publiques vont sortir de terre. Au milieu, cette nouvelle gare qui va voir le jour. Assez classieuse elle aussi, on sort du langage de province, on cherche à lui donner toutes les tailles : humaine dans son contact avec la rue du Simplon, urbaine au nord et celle d'une ville en pleine croissance, qui craque un peu dans ces vêtements en son centre. On pousse les murs, on surélève la marquise historique. On laisse la place pour accueillir le grand flux grisant de cet arc lémanique en plein âge d'or.
 
On laisse la place, mais les chemins sont balisés. On laisse la place, mais on projette déjà celle de ceux qui n'en ont pas. Derrière cette figure de porte se cache celle d'une impasse. On laisse la place, mais seulement pour certains. Les “autres” suivront le chemin qu'on leur a dessiné. Prendront la porte qui les attend, suivront des couloirs habilement localisés, des parcours qui se veulent discrets. Ces autres seront soustrait∙es au grand brouhaha et seront conduit∙es au cœur de la gare dans des cellules de rétention.
 
Un centre de sécurité est en train de se projeter en plein cœur de la gare de Lausanne: plus de 3000m2 de surface dédiée à la police cantonale et aux douanes notamment.
Pratique,  il  n’y  aura  plus  qu’à cueillir  tranquillement  ceux  qui  se  croyaient  le  droit  d'être  arrivés.  Des cellules de rétention et des salles d’audition. Des espaces plus qu’exigus sans aucune vue sur l'extérieur au fond d'un long couloir sous les rails. La belle porte d'entrée que voilà!
 
Dans cette Europe qui organise avec tant de tact pour les nantis l'externalisation de ses frontières, Lausanne, la bonne ville de gauche, entre pittoresque, université et grève du climat, n'y voit rien à redire. Lausanne, comme quelques consœurs de charme sur les rives du Léman, s'est pourtant déjà illustrée grâce à sa police comme détentrice d'une éthique et d'un sens de l'ouverture à géométrie variable. Rappelons Mike mort sous les coups de la police à 300 m de la gare de Lausanne il y a 4 ans. Rappelons Lamin mort dans sa cellule de rétention sans que personne ne s'en aperçoive. Il est si facile de cacher ces erreurs quand les espaces sont déjà agencés pour les faire disparaître. Il est si facile de fermer les yeux quand il n'y aura rien à voir. Personne à rencontrer pour secouer nos idées reçues, personne qui pourra par son regard nous rappeler l'autre monde, celui d'où il vient. Personne aussi pour témoigner de la violence faite à leur accueil et à leur existence. Une gare faite de gens d'ici...
 
La Gare de Lausanne ainsi projetée, participe du même effort de tact que les centres fédéraux d’asile, du même zèle d'efficacité que les patrouilles libyennes sillonnant les mers. Il n'a pas suffi aux Européen.nes et aux Suisse∙sses d'être entaché∙es par Frontex, les prisons libyennes, les accords de Dublin, les
centres fédéraux d’asile, les zones de détention installées dans les aéroports. Maintenant, c'est à la gare de Lausanne à laquelle il nous faudra penser lorsque les mots indignité, racisme, violence étatique, crime occidental raisonneront dans nos têtes face à la misère du monde.
 
Sous la terre, quelques dizaines de mètres au sud des grandes salles d'exposition de Plateforme 10, les cellules de rétention. En regardant s'étaler la belle sensibilité créative des artistes contemporains,
entendrons-nous le murmure, les prières et les cris de ceux et celles qui sous nos pieds, se croyant arrivé.es... chutent? Non.
 
Nous, actrices et acteurs du monde politique et culturel vaudois soussigné∙e∙x∙s, demandons à la Ville de Lausanne, au Canton de Vaud, aux CFF et à la Confédération d’utiliser tous les moyens possibles pour ne pas réaliser ce centre de sécurité. Ne faisons pas de la gare de Lausanne une prison cachée pour des personnes dont pour la plupart, le seul crime est d’être ici.
 
 
Premiers/ères signataires :
 
Antoine Samuel, responsable d’institution culturelle, co-direction du festival Les Urbaines 
Aubineau Mathilde, metteure en scène
Bonard Louis, artiste scénique
Borel Bernard, conseiller communal et pédiatre FMH 
Bovolenta Michela, secrétaire centrale SSP
Büchi Tizian, cinéaste et programmateur
Buclin Hadrien, député Ensemble à Gauche au Grand conseil vaudois
Claude Calame, directeur d’études, Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales
Caloz-Tschopp Marie-Claire, ex-professeurs titutlaire Université de Lausanne, à l’IEPI, institut d’Etudes politiques internationales et Collège international de Philosophie
Clavien Alain, professeur ordinaire, Université de Fribourg 
Conscience Pierre, enseignant, conseiller communal EàG, Lausanne 
Debluë François, écrivain, poète et enseignant
Démétriadès Chloé, co-directrice espace culturel
De Rham Patrick, directeur d’institution culturelle, Lausanne 
Dessimoz Claire, actrice culturelle
Dupuis Johann, conseiller communal Ensemble à Gauche 
Fankhauser Sanshiro, metteur en scène et enseignant 
Filleule Olivier, professeur à l’Université de Lausanne Gagnebin-de Bons David, photographe et enseignant 
Gallaz Christophe, écrivain et chroniqueur
Gennai Ilithyia, membre du collectif Afroféministe AMANI, Conseillère communale PS Nyon 
Guex Sébastien, professeur à l'Université de Lausanne
Guignard Karine Zeina (La Gale), artiste 
Hofmann Blaise, écrivain
Imbach Muriel, metteuse en scène
Jeanneret Delphine, co-directrice Festival Cinéma Jeune Public 
Keller Vincent, député POP au Grand Conseil
Koyuncu Sevgi, conseillère communale Ensemble à Gauche 
Kropf Laurent, artiste-plasticien
Liengme Valérie, comédienne
Mayoraz Maimouna, militante queer et antiraciste, conseillère communale Ensemble à Gauche, solidaritéS
Meinherz Franziska, chercheuse, militante Ensemble à Gauche
Menétrey-Savary Anne-Catherine, ancienne conseillère nationale et écrivaine
MisiegoCéline , POP, Députée au Grand Conseil vaudois, Conseillère communale Lausanne
Moreau Benoit, musicien 
Mouron Quentin, écrivain
N’Duhirahe Cécile, artiste plasticienne
Panchard Ilias, conseiller communal Les Vert∙e∙s à Lausanne
Porchet Léonore, conseillère nationale Les Vert∙e∙s
Prezioso Stéfanie, conseillère nationale (MP), Ensemble à Gauche-Genève 
Rochat Ysaline, co-directrice Les Urbaines
Romanens Thierry, comédien et chanteur
Schwerzmann Pierre, artiste peintre 
Shub Elise, réalisatrice et productrice
Secretan Adina, travailleuse dans le domaine de la culture 
Tara Dragos, musicien
Voutat Bernard, professeur à l’Université de Lausanne
Zecca Manon, éducatrice sociale, conseillère communale Ensemble à Gauche
 
Signatures collectives :
collectif Zooscope
Solidarités Vaud
XR Lausanne



















































































lundi 14 février 2022

La nouvelle gare de Lausanne : un centre de sécurité géant ?

 
Un « centre de sécurité » de la police serait en train de se projeter au cœur de la gare de Lausanne. 3000m2 pour la Police cantonale et les douanes, des cellules de rétention et des salles d'audition, des espaces exigus sans aucune vue sur l'extérieur au fond d'un couloir sous les rails y sont prévus.
 
Nous avons appris que la Direction générale des immeubles et du patrimoine (DGIP) du canton de Vaud, qui pilote ce projet, devrait prochainement valider définitivement la construction inacceptable de cet immense « centre de sécurité » dans le complexe de la gare.
 
Alors que le site de la nouvelle gare de Lausanne se vante de la démarche « participative » du développement du pôle gare, on n’y trouve aucune référence à cette expansion du dispositif sécuritaire. Le collectif lausannois Droit de rester exige une transparence des autorités communales, cantonales et fédérales face à ce projet.
 
Quel processus politique a mené à la décision des CFF de louer ces 3000m2 à la Police cantonale et aux Douanes ? Comment se fait-il qu’il n’y ait vraisemblablement pas eu de mise à l’enquête publique auprès des instances démocratiques de la ville ou du Canton quant à l’utilisation de ces bâtiments ? Quel est le rôle de l’Office fédéral de la douane et de la sécurité des frontières (OFDF) dans tout cela ? Quel est le rôle de l’Office fédéral des transports ? Et à quoi serviront ces cellules de rétention ? Qui y sera détenu et dans quel but ?

Nous exigeons des responsables politiques qu’ils et elles fassent immédiatement toute la lumière sur ce projet et son état d’avancement. 

La gare de Lausanne est en phase de devenir le symbole de la modernisation de la ville. Le développement de ce « centre de sécurité » n’y a pas sa place. Il contribuera à rendre la gare de Lausanne un encore plus haut lieu de la répression policière contre des personnes racisées et précaires, qu’elle ne l’est déjà.

Rappelons Mike Ben Peter, mort sous les coups de la police à 300 m de la gare, et Lamin Fatty, mort dans sa cellule de rétention suite à son arrestation par le corps des gardes-frontières à la gare. Les cellules de la Blécherette et leurs conditions de détention sur le fil de la légalité ont déjà fait couler beaucoup d’encre. Ces questions d’illégalité en zone carcérale seront encore débattues ce mardi au Grand Conseil (Motion « Mettre fin aux conditions illégales de détention dans les zones carcérales »). Les témoignages de contrôle au faciès, d’humiliation et de répression ayant lieu à la gare par les équipes policières et des gardes-frontières qui y patrouillent sont nombreux.

La multiplication de cellules sous les rails permettra une détention encore plus invisible. Nous refusons que, sous les rails et sous nos pieds, des personnes soient interrogées sommairement, fouillées, refoulées, criminalisées parce que niées dans leur droit à circuler et à exister.


Nous demandons à la Ville de Lausanne et au Canton de Vaud de bloquer immédiatement les démarches de validation en cours, et de s’opposer définitivement à ce projet de centre de sécurité dangereux et inhumain.