« Je le dis en tant que votre concitoyenne. Je
l’affirme en tant que ministre de la justice. Et je le répète en tant que
membre de notre gouvernement national : rien n’a plus de
prix que la dignité humaine. » (Simonetta Sommaruga, Berne, le
11 avril 2013)
Voici donc, 22 jours après, un petit conte de la vie ordinaire.
Le 2 mai, au
petit matin, la police débarque au sleep-in de Morges. Elle menotte A. et
l’emmène à la prison de Morges. Quelques heures plus tard, il est transféré à
l’aéroport de Genève, toujours menotté et sans aucun effet personnel.
De quoi
est-il coupable ? D’avoir quitté le Burkina Faso et transité par la
Belgique avant d’arriver en Suisse. La Belgique est ainsi responsable de
traiter sa demande d’asile, et sa demande lui ayant été refusée, son renvoi
définitif.
De crainte
de se voir renvoyé dans le pays qu’il a quitté, A. décide de venir
en Suisse où il dépose une demande d’asile. Le règlement de Dublin fait de lui
un renvoyable en Belgique, sans que sa demande soit analysée par le autorités
suisses. Après trois mois de « sleep-in » à Morges et des errances
quotidiennes dans les rues de Lausanne, avec ses affaires sur le dos, l’heure
du renvoi est arrivée.
A Genève, A.
fait part de son refus de monter dans l’avion. La police l’informe qu’il a le
choix : partir ou aller immédiatement en prison. Dans ce cas, on utilisera
la force pour le renvoyer dans un vol spécial.
Sous le coup
de cette menace, A. prend l’avion pour Bruxelles, accompagné de 2 policiers. Il
est pris de violentes nausées pendant le voyage. A son arrivée, il est libéré
sous condition qu’il se présente au commissariat le lendemain. Donc laissé
seul, à la rue, sans argent, sans habits de rechange. La nuit arrive, A. a
froid et doit se trouver une veste et de la nourriture. Sa longue mésaventure
en Europe continue.
La Suisse a renvoyé
un jeune homme dans un pays qui ne le veut pas et qui ne lui offre aucune aide.
Quid de la dignité humaine ?
Les motifs d’asile
ne sont pas pris en compte, l’individualité des personnes est niée.
Comment
expliquerons-nous ces déportations à nos descendants dans quelques
décennies ? Comment justifierons-nous le fait que des démarches
administratives ont traumatisé des milliers d’êtres humains et les ont
condamnés à vivre dans des conditions inhumaines, au mieux cachés, au pire
enfermés dans des centres de détentions administratifs ?
Lausanne, le 7 mai 2013
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