30 octobre
2013 Douardo a reçu une
décision de rejet de sa demande d’asile au motif qu’il n’a pas
apporté de preuves suffisantes. Il survit donc à l’aide d’urgence
et avait été placé par l’EVAM dans l’abri de protection civile
de Pully, qui est une espèce de cave en béton où les résidents
dorment dans des dortoirs collectifs, sur des couchettes superposées,
et sont expulsés de l’abri pendant la journée jusqu’à 18
heures. Après plusieurs mois de ces conditions éprouvantes, Douardo
se met en ménage commun avec sa fiancée, qui habite à Yverdon.
L’EVAM a
royalement ignoré le changement de situation et enregistré ce
déménagement à son propre crédit, l’air de rien, en déclarant
simplement à Douardo qu’une place lui est toujours réservée dans
l’abri de protection civile, en cas de besoin, et qu’il peut
chaque jour aller y chercher son sandwich de midi (avant 9 h 00), ou
y prendre le repas du soir (après 18 h).
Huit mois plus
tard, Douardo en parle à son mandataire qui l’aide à demander le
versement des prestations d’aide d’urgence à l’EVAM,
conformément à la jurisprudence du Tribunal cantonal PS.2011.0042
du 10 janvier 2012, qui dit que les prestations ne sont interrompues
que si l’entretien est effectivement pris en charge par un tiers.
En l’occurrence, Douardo ne peut pas être pris en charge par sa
fiancée qui reçoit elle-même l’aide sociale et qui est enceinte.
L’EVAM a
refusé de verser les prestations rétroactivement à la date de leur
suppression. La raison en est que cette aide est « subsidiaire ».
Cela signifie que, puisque Douardo n’est pas mort de faim au cours
de ces huit mois, c’est bien la preuve qu’il n’avait pas
véritablement besoin des prestations d’urgence.
Donc, pour
faire des économies budgétaires, la solution pour l’EVAM est très
simple. Les prestations sont supprimées en informant oralement les
intéressés qui vivent avec leurs proches qu’ils peuvent toujours
aller chercher le sandwich de midi ou le repas du soir, s’ils en
ont vraiment
besoin, dans un lieu déterminé par l’EVAM, en l’occurrence pour
Douardo, à quelques 30 km de son domicile. Ils n’ont par ailleurs
pas droit aux titres de transport qui ne font pas partie du droit
fondamental au minimum vital, et ils doivent s’y rendre à pieds ou
aux frais d’autrui. S’ils ne s’y rendent pas, l’EVAM pourra
toujours affirmer qu’ils ne « demandent » pas l’aide
d’urgence et qu’ils ne sont pas du tout obligés de la recevoir.
L’autorité économise ainsi sur les prestations jusqu’à ce que
les intéressés, finalement, parviennent à prendre contact avec un
mandataire qui les aide à faire une demande officielle, écrite et
motivée. Pour Douardo, les économies sur l’aide d’urgence se
montent à environ 9,50 frs par jour pour l’entretien et 300 frs
par mois pour le loyer soit un total, sur les huit mois, de 4'730
frs.
Le Tribunal
fédéral a jugé que l’aide d’urgence se confond avec le droit
fondamental au minimum vital et qu’en aucun cas les prestations
dont la survie du requérant dépend ne peuvent être supprimées. Il
y a un monde entre la définition de notre beau droit tel que les
autorités et les tribunaux l’idéalisent à l’attention du
public, et la réalité que vivent au quotidien les personnes
contraintes de se conformer aux instructions de l’EVAM sur leur vie
quotidienne.
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