dimanche 15 mars 2020

Le SEM reproche aux requérant∙e∙s d’asile de mener une « guerre d’usure »


27 février 2020     
Le SEM a de moins en moins de scrupules à exprimer son agacement devant les demandes d’asile récidivistes, d’une manière qui déborde le cadre de l’action administrative et empiète sur la marge politique du gouvernement. Le SEM est le gouvernement. Il nous propose sa propre idéologie du requérant insoumis donc réprimandable : celui qui résiste aux décisions négatives. La dissidence dans l’asile, ou l’opposition aux points de vue de l’administration sur la légitimité de demander asile, devient un objet de répression politique que le SEM inscrit désormais directement dans ses décisions de rejet, par dégoût de l’asile pourrait-on croire. Voici un extrait d’une décision de février concernant une famille, où il est question de chacun des membres du couple, un jeune couple parents d’un jeune enfant :

« A titre liminaire, le SEM fait remarquer que vous en êtes à votre deuxième, respectivement votre troisième demande d’asile, les précédentes ayant toutes été rejetées, malgré moult recours, demandes de reconsidération et autres recours sur demandes de reconsidération. Ainsi, vous êtes en Suisse depuis 2011, respectivement 2012. Or, la procédure d’asile a pour but, rappelons-le tout de même, d’assurer une protection aux personnes en ayant réellement besoin, et non d’essayer divers motifs d’asile successifs, s’assurant par là un droit de séjour à l’usure grâce à des maneouvres dilatoires réparties sur plusieurs années dans l’espoir d’obtenir, de guerre lasse, une autorisation de séjour. Si cela est théoriquement possible, cela n’était assurément pas dans l’esprit du législateur. »

Aucune base légale ni aucune règle de procédure ne permet au SEM de réprimander. Le « législateur » prévoit au contraire la possibilité de déposer plusieurs demandes d’asile. Cela est inscrit à l’article 111b de la loi sur l’asile. Le SEM n’a que le devoir de traiter ces demandes et d’appliquer la loi, pas de juger, d’un point de vue moral, si cela convient à l’administration qu’après un retour dans leur pays d’origine, les gens y soient confrontés à de nouvelles persécutions et soient contraints de fuir à nouveau à la recherche d’une protection.
En outre, l’affirmation du SEM selon quoi ce jeune couple serait en « demande multiple » est proprement effarante. Le jeune homme explique dans son audition : « Oui, c’est ma première interview. Je n’ai jamais eu d’interview auparavant car j’étais mineur quand je suis venu avec mes parents et, quand on a fait la deuxième demande d’asile, on est partis au SPOP directement, sans passer par Vallorbe, car ils avaient déjà nos données et ils nous ont envoyés directement au foyer. »
Ainsi, c’est la première fois que ce jeune peut exprimer ses propres motifs mais pour le SEM, c’est encore trop.

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