Journée des
réfugié·es : il est temps de défendre leurs droits et d’arrêter de les
expulser !
Nous sommes les témoins de la violence d’État. Elle s’exerce toujours sur les plus faibles, celleux qui ont déjà tant souffert. Enfants arraché·es par la police aux bras de leurs parents, rafles avant l’aube, mépris total pour les vulnérabilités et l’état de santé des victimes : l’État de Vaud exécute lâchement les ordres de Berne et expulse avec une violence inégalée les exilé·es qui viennent demander aide et protection à l’un des Etats les plus riches du monde !
En cette période de crise mondiale, écologique, sociale, et humanitaire, tout renvoi forcé, toute violence contre les réfugié·es, constitue un crime contre la solidarité. Nous ne pouvons rester témoins, nous ne pouvons pas laisser faire.
Aujourd’hui, nous appelons à nous rassembler et à agir contre cette violence. Aujourd’hui, nous occupons la Cathédrale.
Parce que traditionnellement les églises offrent un refuge pour les exilé·es.
Parce qu’historiquement la tour de la Cathédrale et ses cloches servent à alerter la population.
Parce que les autorités vaudoises y prêtent serment.
Nous utilisons ce lieu hautement symbolique pour appeler les autorités vaudoises à adopter un moratoire immédiat sur les renvois forcés de femmes seules, de familles avec des enfants et de personnes vulnérables.
La domination juridique du secrétariat d’État aux migrations n’excuse en rien la cruauté. Surtout quand elle s’exerce envers celleux qui n’ont pas les moyens de se défendre. Le canton de Vaud doit faire preuve de courage, et démontrer qu’une politique migratoire plus solidaire et humaine est possible.
Nous appelons la société civile, les Églises et groupes religieux de toutes confessions, les ONG et la ville de Lausanne (qui se prétend déjà ville refuge) à offrir massivement aide et soutien logistique pour protéger celleux qui fuient la guerre, la violence et la mort. Ce qui se passe est grave. Nous ne pouvons pas croiser les bras. Le faire équivaut à se rendre complice.
Aujourd’hui nous demandons un moratoire urgent sur les expulsions. Plus de 1000 personnes l’ont déjà signé. Nous appelons tou·tes celleux, légitimement inquiété·es par les pratiques égoïstes et violentes de la Suisse et du canton de Vaud, à la signer et à faire usage de tous les moyens pacifiques à leur disposition pour s’opposer aux expulsions forcées !
Informations
complémentaires
Sous prétexte des accords Dublin, permettant de renvoyer des personnes demandant l’asile vers le premier pays européen où elles ont laissé une trace (accords ô combien pratiques pour la Suisse qui n’a pas d’accès à la mer), le Secrétariat d’État aux migrations mène une chasse acharnée contre les exilé·es. Après des expulsions massives vers l’Italie, combattues avec succès par le Collectif R dès 2015, c’est désormais vers la Croatie que s’exécutent de nombreux renvois.
La Croatie n’est pas un pays sûr pour les réfugié·es. De nombreuses exactions contre les droits humains y sont commises, principalement aux frontières. Elles sont bien documentées, et le SEM ne peut pas prétendre ne pas être au courant (voir le récent rapport de Human Rights Watch du 3 mai 2023 et le rapport SOSF décembre 2022)
Nous rencontrons quotidiennement des personnes traumatisées par leur passage à la frontière croate. Nous avons recueillis de nombreux témoignages, qui font tous état de passage à tabac, de pushbacks (= renvois de l’autre côté de la frontière, au mépris du droit d’asile), et parfois même de violences sexuelles. Les personnes qui sont actuellement en Suisse et savent être menacées de renvoi vers la Croatie vivent dans une peur permanente – qui peut durer 18 mois, temps maximal donné aux autorités pour les renvoyer. Nous voyons des situations dramatiques, de personnes fortement atteintes dans leur santé psychique. Plusieurs des personnes que nous accompagnons sont actuellement hospitalisées.
Car la situation est
dramatique également dans le pays, et pas uniquement aux frontières de la
Croatie. C’est la même police qui exécute les pushbacks qui patrouille ensuite
dans le pays. Comment imaginer exiger des personnes traumatisées qu’elles
vivent ensuite la procédure d’asile en Croatie ? La situation est
tellement grave que l’ONG Médecins du monde a décidé de suspendre son action
dans ce pays, estimant que la situation n’est pas assez sûre pour les
demandeurs et demandeuses d’asile.
Images: François Graf - STRATES
Témoignages recueillis par Droit de rester Lausanne :
témoignage de Z., renvoyée en Croatie
« Le matin du 2 mai 2023, alors que tous les membres de la famille dormaient, j'ai soudainement sursauté lorsque j'ai entendu la porte s'ouvrir, et tout à coup j'ai vu plusieurs personnes en uniformes debout au-dessus de moi dans ma chambre, et j'ai été choquée. Et je ne portais aucun vêtement, j'ai enroulé la couverture autour de moi et j'ai commencé à crier. Ils nous ont dit avec une cruauté totale que « ce n'est pas votre pays » et « nous ne voulons pas de vous. Vous devez partir d'ici aujourd'hui. » J'ai rapidement serré mes enfants dans mes bras, mais quatre d'entre eux m'ont attrapé les mains et les pieds et m'ont séparée des enfants avec force et pression, de sorte que mon épaule et l'épaule de mon fils étaient contusionnées. Nous pleurions et suppliions. Mais ils n'y ont prêté aucune attention et ont mobilisé tout leur monde et ont menotté les mains de mon mari pour qu'il ne fasse aucun mouvement. Et ils nous ont emmenés à l'intérieur de la voiture. Et mon fils était dans un état de peur extrême et de stress tout le temps. Une fois qu'il était à l'intérieur de la voiture, il vomissait. Je n'oublierai jamais ce manque de respect, et je me plains à ces policiers impitoyables qui ont violé notre vie privée et meurtri le corps de mon fils..... »
Ce renvoi violent, qui nous a choqués, n’est malheureusement pas le seul.
Voici un petit aperçu de ce qui s’est passé dans le
canton de Vaud ces derniers mois :
Début octobre 2022, A. jeune afghan présentant déjà des traumatismes de son exil, se faisait arracher du lit à 5h30 du matin par la police vaudoise. Après avoir été frappé et pris ses empreintes de force, il sera incarcéré plusieurs semaines à Favra avant d’être renvoyé.
Début janvier N. est renvoyé en Espagne à peine la trêve de Noël finie. 10 policiers pour un jeune homme épuisé.
Fin mars, la police est entrée à 5h45 pour arrêter Y. Malgré son état d’extrême détresse, elle fait pression sur lui plusieurs heures, avant de déclarer être venus « par erreur ». Y. qui a failli se suicider lors de l’intervention a échappé de peu à la mort.
Fin mars 2023, la police a forcé l’appartement de N. pour le renvoyer au Sri Lanka. A son arrivée, il est remis directement aux mains de services secrets sri lankais, ceux-là mêmes qui l’avaient torturé avant sa fuite. Jusqu’à aujourd’hui, il doit encore se présenter régulièrement à la police qui le rackète.
Mi-mars 2023, É. est renvoyé seul dans un vol spécial, à destination de la Croatie où son ami est mort sous les coups de la police.
Fin avril, la police fracasse la porte de la chambre de F., qui, écrasé par le poids de la porte sur lui, perd connaissance. Il est tout de même renvoyé en Croatie.
Début mai 2023, M., 18 mois, est arrachée des bras de sa mère, mise seule dans un fourgon pour obliger sa mère à suivre la police en Croatie.
Le même jour les trois enfants de la famille R. sont violentés pour être renvoyés en Croatie dans le même vol, entourés de dizaines de policiers. Le plus jeune, âgé de 7 ans, portait à son arrivée plusieurs marques sur le corps.
Fin mai, un couple est réveillé à l’aube par la police. Madame doit être hospitalisée en urgence suite à sa décompensation durant l’intervention… Mais les policiers essaient tout de même de renvoyer son mari seul, le transportent jusqu’à Zurich, avant de se raviser au dernier moment.
Juin 2023, des dizaines de policiers font irruption dans la chambre de J. et se jettent sur elle alors qu’elle dort. Ils s’excusent peu après, ils l’ont confondue avec sa voisine de chambre. Elle est par la suite hospitalisée.
Ressources :
témoignages de personnes
passées par la Croatie, recueillis par les collectifs Droit de rester, octobre
2022 : https://drive.google.com/file/d/1PMVhRMGYKUsflZEDvZOoB8HiZx9v2e5q/view
Violences policières en Bulgarie et en Croatie : conséquences pour les transferts Dublin. Analyse juridique et revendications de l’Organisation suisse d’aide aux réfugiés OSAR, 13 septembre 2022 : https://www.osar.ch/fileadmin/user_upload/Publikationen/Juristische_Themenpapiere/220913_Polizeigewalt_final_FR.pdf
Rapport Human Right Watch, 03 mars 2023:
https://www.hrw.org/news/2023/05/03/croatia-ongoing-violent-border-pushbacks
Les renvois Dublin vers la Croatie doivent immédiatement cesser. Un rapport de Solidarité sans frontières, 05 décembre 2022 : https://www.sosf.ch/cms/upload/221205_Bericht_Pushbacks_FRZ_Web.pdf
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