20 mars 2018
« Ils sont venus à 5 ou 6 policiers, que des hommes, entre 6h et
6h30 du matin. Ils toquent juste un petit peu et ils entrent, je n’ai même pas
eu le temps de me réveiller. Je dormais en tee-shirt avec une culotte et ils
m’ont dit de me lever. La pièce est assez petite et j’étais là, au milieu de
ces hommes qui m’ont ordonné de m’habiller et de prendre au maximum 27 kg. Ils
ne m’ont pas autorisée à me mettre à l’écart et j’ai dû m’habiller dans la
salle de bain avec la porte ouverte. Ensuite ils m’ont emmenée au poste. Ils
m’ont dit que j’allais être conduite à Genève où je prendrai l’avion pour
retourner dans mon pays. Ils m’ont enfermée dans une cellule toute petite. Il
faisait froid et ils m’avaient obligée d’enlever mon manteau. Je grelottais.
J’étais seule et très angoissée. Vers les 10h30 ils sont venus et m’ont donnée
à d’autres policiers qui devaient me conduire à Lausanne. Ils m’ont menottée et
m’ont fait monter dans un fourgon de transfert de prisonniers. Ce sont de
minuscules cabines où on s’assoit les coudes serrés contre soi, comme dans une
boîte de sardines. Il y a une caméra juste au-dessus pour nous surveiller tout
le temps et regarder ce qu’on fait. On ne peut rien faire dans cette boîte,
même pas se lever, juste se sentir épiée. Tout y est métallique même le siège
et j’avais toujours très froid. A Lausanne, j’ai été soumise à la fouille. On
m’a enfermée dans une pièce et une femme policière m’a dit de me déshabiller.
Je ne voulais pas enlever ma culotte parce que j’avais mes règles et que je me
trouvais honteuse. Je ne voulais pas qu’elle voie. Mais elle m’a dit que ce
n’est pas grave et m’a quand même ordonné d’enlever la culotte. Je me sentais
humiliée. J’ai dû ôter la serviette devant elle et la lui tendre. Elle l’a mise
dans un gant pour la palper. Je ne sais pas ce qu’elle cherchait. Je ne suis
pas une évadée ni une criminelle. Qu’est-ce que j’aurais caché ? Ensuite,
elle m’a dit « Ecarte les jambes ». Je vous assure, je suis passée
par la Hongrie où la police est brutale et les migrants sont maltraités, et
j’ai été emprisonnée là-bas, mais jamais on ne m’avait demandé d’enlever ma
culotte. Elle a regardé en se penchant. Je ne sais pas ce qu’elle voulait voir.
C’était sans doute un des pires moments de ma vie. J’ai été très choquée. Je me
sentais dévastée, rabaissée et contrôlée comme un objet, sans dignité. Ensuite
ils m’ont enfermée dans une cellule sans fenêtre, avec seulement un judas sur
la porte. Il y avait un lit, un matelas, une couverture et une cuvette de WC.
J’ai été très angoissée dans cet endroit. J’ai tapé sur la porte et j’ai
appelé. J’ai entendu un autre détenu me dire d’appuyer sur le bouton. Je
n’avais même pas vu le bouton. Quand ils sont venus, j’ai dit que j’avais
besoin de parler à quelqu’un, que je ne supportais pas d’être enfermée là et
laissée seule. Ils m’ont demandé « pourquoi tu pleures ? »,
comme si je devais trouver ça normal. Finalement, une dame qui me connaissait
et qui a su que j’avais été arrêtée est venue. Je ne sais pas ce qu’elle a
discuté, mais vers midi j’ai été libérée. J’ai dû être conduite vers ma
psychiatre parce que je suis sortie en état de choc et déstabilisée. Je
tremblais et je me sentais mal. »
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